Château les Carmes Haut-Brion



A Bordeaux nous avons beaucoup de Châteaux, tous plus somptueux les uns que les autres mais certains ont ce petit truc en plus qui les distinguent par leur singularité. Que ce soit grâce à une architecture audacieuse ou encore un terroir incroyablement qualitatif, il est un domaine qui regroupe tous ces critères particuliers et qui lui confèrent quelque chose d'unique en son genre : le Château Les Carmes Haut-Brion.
Tout commence lorsque j'ai entré l'adresse du domaine dans le GPS : 20 rue des Carmes - 33000 ..... BORDEAUX ! oui vous avez bien lu, à Bordeaux. Il s'agit d'un vignoble en ville. Mais, quitte à faire original, autant y aller à fond, seule l'entrée et quelques dizaines de mètres du domaine sont sur la ville de Bordeaux. Lorsque l'on s'avance en direction de la boutique puis du chai, nous passons sur la commune de Pessac. Et au loin à droite, perché sur sa croupe tel un château fort qui observe ses terres, le château historique des Carmes haut-Brion qui se situe quant à lui sur la commune de Mérignac. La séparation entre cette dernière et Pessac se faisant via le Peugue, une rivière qui, vous allez le découvrir, a toute son importance dans la rénovation qui a été entreprise en 2014.

Les Carmes Haut-Brion 2.0 



L'origine de la propriété remonte à la fin du XVIe siècle avec un personnage célèbre dans le bordelais : Jean de Pontac, alors seigneur du domaine Haut-Brion fait don du moulin de Crespiac à l'ordre catholique des Grands Carmes avec notamment des vignes sur le domaine. Petit à petit le domaine s'étend jusque sur le coteau de Graves anciennement appelé Aubrion. Le vin était alors vendu sous le nom de Haut-Brion jusqu'à ce que les Carmes soient obligés de céder leurs biens à la Révolution. C'est un négociant qui rachètera peu de temps après le domaine pour le renommer les Carmes Haut-Brion et le léguera par la suite à sa famille, les Chantecaille-Furt. Ce sont ces derniers qui ont érigé le château tel que nous le connaissons actuellement et dans lequel l'ancienne propriétaire y vit toujours.
C'est donc en 2010 qu'un nouveau chapitre s'écrit avec le rachat de la propriété par le groupe Patrice Pichet (immobilier) . Il entre alors dans une mutation digne du terroir sur lequel il repose. Son nouveau propriétaire fait appel en 2014 au designer Philippe  Starck et à l'architecte bordelais Luc Arsène Henry afin de concevoir un incroyable chai au beau milieu du lit de la rivière le Peugue. Cette dernière a du être contournée le temps des travaux.
Et c'est désormais un bâtiment presque furtif qui est dressé à la frontière exacte entre Mérignac et Pessac. Une proue de bateau inversée même, sans aucun pilier de soutien. La coque est autoportante et des dizaines de pieux ont dû être installés dans le sol afin d'assurer un bon maintien de l'ensemble.

Une belle prouesse technique et architecturale!


De l'extérieur, le bâtiment semble petit et assez étroit. Ce n'est qu'une illusion car une fois à l'intérieur, il y a tout l'espace nécessaire et même plus, pour pouvoir vinifier le vin dans les meilleurs conditions.

Mais assez parlé de design et d'architecture. Revenons au vin avec le millésime 2017. Les Carmes comme la plupart du vignoble bordelais, a été touché par les gelées des nuits du 22, 27 et 28 avril ce qui a pour résultat des vendanges un peu précoces de 10 à 12 jours. Ici comme ailleurs, ce sera un millésime "humain" à savoir que beaucoup de règles et de connaissances habituelles des vendanges ont du être remises à plat cette année. Chaque vigneron a dû produire le vin en son âme et conscience en ne se fiant qu'à son instinct. Ce qui va, je n'en doute pas, donner des vins très personnels et avec une âme en plus par rapport à d'autres millésimes d'ordinaire plus consensuels. Comme le dit Guillaume Pouthier, le directeur l'exploitation des Carmes, " il n'y a jamais de mauvais millésime lorsque c'est précoce à Bordeaux " . Avec l'aide de Stéphane Derenoncourt, oenologue conseil du domaine, l'équipe a cette année su tirer partie des conditions climatiques pour faire ressortir le meilleur de la vigne.

Ici le maître mot est équilibre 

Grâce au "Donuts" gonflables (également appelés compensateurs gonflables) qui sont placés en haut de chaque cuve pleine, le chapeau de marc est toujours immergé dans le jus et protège la macération de l'oxydation. Cette technique permet d'extraire des tanins plus soyeux et doux. Il suffit de gonfler ce qui ressemble à une bouée, naturellement elle va repousser vers le bas le chapeau de marc et le laisser ainsi immergé dans le jus en cours de fermentation.


Guillaume Pouthier a également une manière assez singulière qui m'a beaucoup plu, de parler de ses jus grâce à la comparaison avec une palette de couleurs liées à la palette aromatique. Chaque cépage et chaque cuve en fonction des parcelles a sa propre identité, imperceptible certes, mais d'un point de vue pédagogique je trouve l'idée intéressante. Ou comment lier des couleurs à certains jus, eux-mêmes réalisés à partir de certaines parcelles du domaine. Je reviendrai sur ce point dans un article complémentaire dans les prochaines semaines.

J'ai eu la chance de déguster le cabernet encore sous marc (jus ayant  moins d'un mois d'existence environ au moment où je l'ai dégusté, encore en cuve) . Uppercut des papilles. Un jus laiteux, assez flatteur malgré le stade embryonnaire mais déjà très gourmand et une petite sensation de sucrosité. Voilà un jus que j'ai hâte de re-déguster à l'occasion des primeurs qui auront lieu tout début avril 2018 quelques semaines après sa mise en barriques. Barriques dans lesquelles le vin se reposera durant 18mois avec une mise en bouteilles prévue en septembre 2019.
Les Carmes Haut-Brion n'échappe pas à la place bordelaise pour vendre sa production qui est écoulée à 90% directement pendant la période des primeurs soit environ 3000 caisses (35000 bouteilles) .



Il existe également un autre vin fait par la propriété mais qui n'est pas un second vin dans le sens où le C - c'est son nom - est mis en bouteille uniquement lorsque l'équipe technique décide qu'il est suffisamment prêt pour changer de contenant. Vous ne le retrouverez uniquement sur les tables des restaurants en France. A titre d'information, le millésime 2013 (le 3e de cette cuvée) est resté 3 ans en barriques.



Alors pour ceux qui seraient de passage à Bordeaux, n'hésitez pas à franchir les portes du domaine qui est le + proche du centre ville. Cette visite est une pause dans le temps et dans l'espace niché pourtant au coeur de la ville.

plus d'informations : http://www.les-carmes-haut-brion.com/visites






Commentaires

Unknown a dit…
Merci! Je ne manquerai pas d'y faire un tour à mon retour en France.

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