Dégustation #4 - Château Nénin



Ce mois-ci pour le désormais rituel de la dégustation, partons à la découverte du mythique terroir de Pomerol avec le Château Nénin 2009 que j'ai choisi à la Cave Dourthe, mon alter-ego qui me permet de faire ces dégustations libres .
J'ai choisi volontairement un domaine que je ne connaissais pas et dont j'ai appris qu'il était la propriété de la famille Delon (non pas l'acteur) déjà propriétaire de Léoville Las Cases (un petit vin de la rive gauche que même de Funès arrive à trouver à l'aveugle et sans déguster, juste à l'oeil dans l'Aile ou la cuisse). Il s'agit d'un domaine avec une des plus grandes superficies de l'appellation : 32ha !! là où on est plutôt dans l'esprit des Climats de Bourgogne avec de toutes petites superficies qui ne dépassent que très rarement 10ha. Avec des sols argilo-graveleux parmi les plus beaux de l'appellation, le château Nénin a attiré mon attention par la simplicité de son étiquette. C'est sobre, pas de chichi et j'aime bien, cela cache souvent de très belles choses. Et comme il est de bon ton dans les familles bordelaises de ne pas trop montrer sa réussite, ce château ne déroge pas à la règle avec la sobriété visuelle de son étiquette.

Chose rare, ce vin étant tellement jeune et puissant, il a fallu que j'y revienne à 2 dégustations à 18h d'intervalle pour pouvoir étudier au mieux sa structure qui m'a parue au début (après 2h d'ouverture et un très rapide carafage) très éteint et fermé. Mais comme je ne suis pas du genre à abdiquer, j'ai replacé le tout dans la bouteille, refermé et placé au frais  jusqu'au lendemain. Grand bien m'en a pris, j'ai redécouvert un vin totalement différent, qui s'est révélé au maximum. J'aime ce genre de vin qui demande à ce qu'on s'occupe bien de lui avant qu'il puisse donner toute son expression et montrer l'ampleur de ses puissants arômes.

LA ROBE
On est là sur un vin relativement jeune et au potentiel de garde qui à mon avis sera à faire pâlir les marchands de vin jeunes et ça se ressent dans la couleur : de beaux reflets violets tirant sur le lie de vin avec une belle intensité en son coeur.

LE NEZ
là c'est le fruit qui vous explose au narines. Du cassis, un peu de groseille, des notes de réglisse et quelques épices. On sent tout de suite la puissance du merlot qui a poussé sur un sol en partie graveleux et qui en a extrait toutes ses facultés fruitières.

LA BOUCHE
Première dégustation : belle intensité en première attaque puis plus rien, il s'éteint. Là j'ai eu un grand moment de solitude . Pas un Pomerol, non un vin de cet écrin viticole ne peut pas se terminer aussi vite !
Deuxième dégustation H + 18h : là c'est une autre histoire les amis. On est dans de l'art. Dans ce qui se fait de plus complexe dans le monde du vin. C'est un poème qui s'écrit tout seul devant vos yeux et surtout vos papilles ébahis. On garde la grande intensité en début de bouche, puis elle s'atténue très rapidement mais dans une douceur telle qu'on ne sait plus où est le temps. Tout semble s'arrêter. Le Merlot puissant (80%) vous renvoie à la figure des notes de fruits noirs compotés, presque fondus pour n'en recueillir que l'essence de leurs arômes. Le chocolat fait une discrète mais néanmoins suffisante apparition. Il donne une douceur et une onctuosité à l'ensemble ce qui confère à ce vin, une classe folle. On est bien sur un terroir d'exception avec un vin qui a été conçu dans les règles de l'art et dans le respect du terroir. On sent des notes de bois très très fines, c'est bien intégré à la structure du vin. C'est du velours liquide. Un claque à côté de laquelle j'avais failli passer si je m'étais arrêté sur la 1e dégustation. Comme quoi, en persévérant un peu on découvre des joies inattendues .

L'ACCORD MET ET VIN
J'aime bien casser les codes et là encore j'ai tenté un accord un peu nouveau mais qui ne me paraît pas totalement hallucinant. Mélanger l'Italie et la France. J'ai dégusté ce vin sur une pizza fraîche. "non mais il est fou ce type, c'est donner du lard à des cochon que de mélanger un tel nectar avec une vulgaire pizza..." Attendez la suite pardi !!
Seule la pâte était cuite et j'ai rajouté tous les ingrédients frais par dessus : Ricotta, prosciutto, fines tranches de tomates, roquette, parmesan et filet d'huile d'olive + feuilles de basilic frais. Alors finalement, ça a de la gueule quand on décrit le plat non ? Le tout a été un régal. La ricotta adoucit les angles de l'amertume de la roquette et l'huile d'olive vient lier le tout. C'est un moment d'extase qui a su mettre en valeur ce magnifique vin, faisant oublier au passage les 14.5% d'alcool ! oui vous avez bien lu. C'est Mendoza sur Dordogne ! Et pourtant on y pense même pas à cet alcool tellement le rendu du vin est soyeux et d'une douceur exquise.

LE PRIX
un grand vin de cette finesse se paie forcément à un prix conséquent mais vous avez là un vin qui n'est pas forcément destiné à Mr tout le monde (la preuve j'ai du me concentrer encore et encore pour pouvoir en percer les mystères et je ne suis pas certain d'avoir bien su tout saisir) . 58€ sur le site de la Cave Dourthe . Si vous avez une connaissance ou un membre de la famille connaisseur, ce vin est fait pour lui. Mais attention, il demande à ce qu'on s'occupe bien de lui avant qu'il puisse vous livrer tous ses arômes. On ne l'ouvre pas comme ça sur un coup de tête sinon il vous enverra dans les rosiers de mamie. C'est qu'il serait presque punk ce vin finalement, et ça me plaît bien dans ce monde feutré :)

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