Dégustation #2 - Château Clerc Milon



Après avoir visité la rive droite et le Château Grand Barrail Lamarzelle Figeac en Saint-Emilion le mois dernier, ce mois-ci toujours grâce à l'aide précieuse de la Cave Dourthe à St-Emilion, nous allons à gauche toute et même en haut à gauche toute. Direction l'appellation de Pauillac. J'avais envie de vous faire découvrir ce bout de terre presque perdu, presque en autarcie, flanqué au bord de l'eau et qui remonte un peu plus profondément dans les terres à l'ouest, Pauillac est un peu la synthèse des différents terroirs locaux avec une certaine dominance pour des sols de graves + sable à certains endroits ce qui est le terrain de jeu de notre ami le cabernet sauvignon. A cela nous rajoutons des sous-sols bien travaillés et drainés juste ce qu'il faut pour faire en sorte que la vigne puisse s'enraciner assez profondément. L'appellation est prise en sandwich entre St-Julien au sud et St-Estèphe au nord.

J'ai donc jeté mon dévolu sur une propriété dont mes yeux louchaient dessus depuis belle lurette, le Château Clerc-Milon. Un vin qui était jusqu'à sa récente disparition, la propriété de la Baronne Philippine de Rothschild. Situé à la sortie de Pauillac, juste après son grand cousin Mouton Rothschild, Clerc-Milon est à environ 1km de l'estuaire. à sa droite.
J'ai voulu tester avec juste le petit recul nécessaire, le millésime 2010 afin de voir les premières notes d'évolutions qui seront, je dois l'avouer, longues voire très longues à découvrir au fil des années car ce vin comme la plupart des Pauillac, est un grand vin de garde et dans ce millésime cela accentue encore plus sa capacité à traverser les 20 prochaines années de manière la plus sereine possible.
Mais déjà ce 2010 m'a fait l'effet d'une bombe.

"c'est jeune ! " vous allez me dire. "Bien sûr" je vous répondrais. Mais dans l'optique de cette dégustation intermédiaire dirons-nous, j'ai déjà pu constater tout le potentiel de ce vin qui a été au delà des espérances que je mettais en lui.

LA ROBE
Comme la majorité des vins de l'appellation, on retrouve cette typicité d'un rouge foncé à tendance noir profond, avec quelques reflets violets sur la couronne. Rien qu'à l'oeil on sent une certaine forme de puissance dans le verre.

LE NEZ
Le cabernet majoritaire (50%) m'a tout de suite sauté au nez si vous me permettez ce jeu de mot très basique avec ses notes de fruits noirs à dominance de cassis et une pointe de violette assez discrète mais qui donne une touche de fraîcheur pas désagréable. On me souffle dans l'oreillette que la réglisse aurait été aperçu dans ce cocktail d'arômes mais pour moi le vin étant encore jeune, je n'ai pas saisi facilement cette note mais elle paraît pertinente et sera bien plus présente à mesure que le vin vieillira.

LA BOUCHE
Une grande tension, on retrouve un boisé très très finement dosé et bien intégré, vraiment je souligne le caractère discret de cela car je suis de moins en moins fan de boisé mais lorsque c'est intégré de manière aussi fine, cela donne une structure au vin, une sorte de charpente. La bouche est complexe mais surtout c'est l'intensité de celle-ci qui est hallucinante. C'est tout simplement l'un des Pauillac les plus puissants que j'ai eu l'occasion de goûter. Puissance ne rime par forcément avec manque de finesse, bien au contraire. Je retrouve le velouté que j'aime tant dans certaines appellations de la rive gauche, additionné à une belle longueur en bouche, le palais est flatté. D'abord il se prend un belle claque puis se remet rapidement et l'évolution nous emmène vers des notes légèrement acidulées, de prune légèrement séchée (mais pas au stade de pruneau) .C'est un grand vin, tout le monde qui aura l'occasion de le déguster en conviendra. L'assemblage est aussi étonnant que sa bouche : si les quatre premiers cépages sont totalement dans ce qu'on fait en général à Pauillac, le dernier va vous étonner. 50% Cabernet / 36% Merlot / 11% cabernet franc / 2% petit verdot / 1% carménère. Ce dernier est un cépage qui avait été décimé par le phylloxera puis qui refait son apparition depuis quelques années sur les terres du Médoc. C'est une sorte de cousin du merlot qu'on confond assez souvent même. Il apporte l'ultime touche de fruité et de douceur au vin de Clerc Milon.

L'ACCORD MET ET VIN
J'ai dégusté ce vin sur un tournedos rossini cuit à point et accompagné de cèpes grillés qui ont apporté une certaine acidité intéressante pour contrebalancer avec la puissance des tanins. L'astuce du chef : prendre une viande d'excellente qualité car elle seule sera capable d'atténuer les tanins les + costauds.

LE PRIX
78€ sur le site de la Cave Dourthe . On est clairement dans du haut de gamme et franchement, on en a pour son argent. Certains vins ne sont fait que d'étiquette et les prix totalement démesurés comparés à la qualité, autant avec ce domaine, vous ne serez pas déçu. Si je devais comparer cette bouteille à une voiture, je dirai que c'est un Porsche Cayman. On a pas encore osé franchir le cap  de la 911 mais on a déjà le pied dans l'univers de la marque et on se fait plaisir immédiatement car tout est facile à appréhender. Il ravira des grands connaisseurs de vin en guise de cadeau.

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